Charges de copropriété : retour sur les principes

Le syndicat des copropriétaires doit assumer la conservation et l’amélioration de l’immeuble et l’administration des parties communes.

Les charges* constituent ainsi la source d’approvisionnement principale des finances du syndicat. Les copropriétaires bénéficient, indirectement mais nécessairement de cette contribution collective. La valeur de chaque lot dépend du bon entretien de l’immeuble Les charges « tendent par nature à préserver [une composante du] patrimoine » du débiteur, « nécessairement appelée à se déprécier si [ces dépenses] n’étaient pas exposées » a jugé la Cour de Cassation.

On ne peut y échapper.

LES PRINCIPES LEGAUX DE LA REPARTITION

Les modalités de répartition des charges sont déterminées par l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, entre les différents lots au sein de la copropriété. Il existe une caractéristique du régime légal actuel. Elle repose sur une répartition des dépenses en deux catégories distinctes.

Cette distinction, tout comme les règles qui en découlent, sont d’ordre public. Il ne saurait y être dérogé dans les clauses du règlement de copropriété, voire en justice.

Les charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement communs

Le dispositif légal fixe le régime des « charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement communs ». Ces sommes sont régies par le critère d’utilité « objective » pour le lot.

« La charge entraînée par un service collectif ou un élément d’équipement commun n’est pas directement liée à la structure de l’immeuble, mais lui apporte un complément d’utilité ou de confort, un agrément supplémentaire ou une facilité d’usage. »

Ces charges ne concernent que certains lots selon un unique critère, celui de l’utilité dite « abstraite » apportée au lot par l’équipement ou le service collectif considéré.

 Les modalités de répartition sont donc indépendantes de l’utilisation concrète (ou de la non-utilisation) du service ou de l’élément par les copropriétaires eux-mêmes.

Entrent dans cette catégorie, notamment, les frais afférents aux ascenseurs, au chauffage collectif, aux résidences-services, à la climatisation, au gardiennage, etc.

Les charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes

C’est l’alinéa 2 de l’article 10 qui prévoit la participation aux charges de conservation, d’entretien et d’administration des parties communes, qu’elles soient générales ou spéciales. Toutes les dépenses du syndicat qui ne ressortissent pas du premier type de charges, relèvent nécessairement du second

Tout ce qui concerne l’intégrité, l’entretien, la préservation, tout comme la valeur même de l’immeuble, est compris dans cette catégorie de charges. Il s’agit, notamment, des dépenses de travaux, des frais relatifs aux organes de la copropriété (honoraires du syndic, frais de convocation et de tenue de l’assemblée générale, frais induits par le conseil syndical), des primes d’assurance.

LE REGLEMENT DE COPROPRIETE

En termes de charges, le contenu du règlement de copropriété doit comporter, un état de répartition des charges assorti de prévisions précises. Mais il est possible de trouver, dans certaines copropriétés, des particularités induites par la présence de parties communes dites « spéciales » ou de certains éléments d’équipement.

Le règlement de copropriété mentionné par l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965 contient en particulier un état de répartition des charges tel que prévu par l’article 10 de la loi de 1965

Cet état définit les différentes catégories de charges et distingue celles afférentes à la conservation, à l’entretien et à l’administration de l’immeuble, celles relatives au fonctionnement et à l’entretien de chacun des éléments d’équipement communs et celles entraînées par chaque service collectif

S’agissant des charges de l’alinéa 2 de l’article 10 de la loi de 1965, la prévision de parties communes dites « spéciales » aura une nécessaire incidence en termes de répartition des sommes réclamées aux copropriétaires.

La  réforme opérée par la loi du 23 novembre 2018, dite « loi Élan », qui a ajouté un article 6-2 (alinéa 2) dans la loi de 1965 aux termes duquel la création de parties communes spéciales est indissociable de l’établissement de charges spéciales à chacune d’entre elles.

Enfin, le règlement de copropriété peut prévoir que seuls les copropriétaires qui ont à leur charge l’entretien de certains éléments d’équipement ou de certains services collectifs, prennent seuls part au vote sur les décisions qui concernent ces dépenses.

LA REPARTITION DES CHARGES : L’ACTION JUDICIAIRE

L’article 43 de la loi répute non écrites toutes les stipulations contraires aux dispositions légales d’ordre public. Or, précisément, l’article 10 de la loi figure au rang des dispositions impératives du statut de 1965. Une action judiciaire est donc ouverte à raison de « la méconnaissance des critères légaux de répartition des charges »

L’action judiciaire est enfermée dans le délai dont bénéficient les copropriétaires demandeurs.

Il est admis que « Les clauses réputées non écrites par l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965 étant non avenues par le seul effet de la loi, les copropriétaires demandeurs [sont] en droit de faire établir l’assiette et le mode de répartition des charges selon les critères légaux », même après l’expiration des délais spéciaux figurant dans la loi de 1965

De manière générale, il en découle que n’importe lequel des copropriétaires peut « à tout moment » faire constater l’absence de conformité des stipulations du règlement de copropriété aux prévisions légales et faire établir une répartition des charges conforme, cette fois, aux critères déterminés par l’article 10 de la loi de 1965

La solution est maintenant inscrite dans la loi de manière très claire : la juridiction qui constate que certaines clauses de la répartition des charges sont réputées non écrites, doit procéder à une nouvelle répartition.

* Charges de copropriété : les principes fondamentaux – Etude par Jean-Marc Roux maître de conférences à l’université d’Aix-Marseille