La question semble simple mais malheureusement, la gestion de l’exonération de la plus-value résultat de la vente de sa résidence principale est pleine de pièges. La jurisprudence nous le rappelle. Compte tenu de l’enjeux, il est donc nécessaire de maîtriser les bonnes pratiques en la matières.
Rappel du principe :
Lors de la vente d’un bien immobilier, le propriétaire de cet actif qu’il soit une personne physique ou encore une société relevant de l’impôt sur le revenu : société de type SCI familiale doit s’acquitter d’un impôt sur la plus-value.
Le régime des plus-values immobilières privées s’applique donc aux plus-values réalisées par les personnes physiques dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé, soit directement, soit au travers de sociétés de personnes relevant de l’impôt sur le revenu.
Les biens dont la vente donne lieu à ce type de plus-value sont :
- Tous les immeubles bâtis ou non bâtis (constructions ou terrains) ainsi que les droits relatifs à ces biens (usufruit, nue-propriété, servitudes…).
- Certains titres de sociétés sont également susceptibles de donner lieu à l’application du régime des plus-values immobilières
La plus-value imposable est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition de l’immeuble. Lorsque la vente porte sur un immeuble détenu depuis plus de cinq ans, la plus-value est réduite d’un abattement pour durée de détention.
Lorsque l’immeuble cédé est détenu depuis plus de cinq ans, la plus-value est diminuée d’un abattement pour durée de détention dont le montant diffère selon qu’il s’agit de calculer l’impôt sur le revenu ou les prélèvements sociaux.
Pour la détermination du montant imposable à l’impôt sur le revenu, l’abattement est de :
- 6 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième et jusqu’à la vingt et unième ;
- 4 % au titre de la vingt-deuxième année de détention.
L’exonération d’impôt sur le revenu est ainsi acquise après vingt-deux ans de détention. Par exemple, une plus-value réalisée le 1er juin 2022 est exonérée si l’immeuble a été acquis avant le 1er juin 2000.
Pour la détermination du montant imposable aux prélèvements sociaux, l’abattement est de :
- 1,65 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième et jusqu’à la vingt et unième ;
- 1,60 % pour la vingt-deuxième année de détention ;
- 9 % pour chaque année au-delà de la vingt-deuxième.
Le taux de l’impôt à l’IR est de 19%
Le taux global des prélèvements sociaux est 17,2%
Le cas particulier de la résidence principale
La plus-value réalisée lors de la cession d’une résidence principale est exonérée, quel que soit le type de logement (maison individuelle ou appartement).
Mais seuls ouvrent droit à l’exonération les immeubles (ou parties d’immeubles) qui constituent la résidence habituelle et effective du propriétaire lui-même au jour de la cession. Les immeubles donnés en location et les immeubles occupés gratuitement par des membres de la famille du propriétaire ou des tiers ne peuvent donc pas en bénéficier.
Un immeuble vacant au moment de la vente, mais qui a été occupé comme résidence principale jusqu’à sa mise en vente, ouvre droit à l’exonération si la cession intervient dans un délai normal de vente, soit dans un délai d’un an dans un contexte économique normal.
Aucun délai maximum ne peut toutefois être fixé a priori : l’appréciation du délai normal de vente est une question de fait qui résulte de l’ensemble des circonstances de l’opération, et notamment des diligences accomplies par le cédant pour vendre au plus vite compte tenu des motifs de la cession, des caractéristiques de l’immeuble et du contexte économique et réglementaire local.
C’est ainsi que l’exonération a été jugée applicable dans le cas d’une vente réalisée vingt-neuf mois après le départ du propriétaire, la révision du plan d’occupation des sols en cours ayant eu pour effet de ralentir l’opération.
La résidence habituelle doit s’entendre du lieu où le contribuable réside habituellement pendant la majeure partie de l’année.
Il s’agit d’une question de fait qu’il appartient à l’administration d’apprécier sous le contrôle du juge de l’impôt. C’est justement parce qu’il s’agit d’une question de fait que les éléments tirés de la jurisprudence sont importants à connaitre afin d’évaluer la marge de manœuvre en la matière.
Prenons l’exemple d’un arrêt récent (Arrêt de la CAA de Lyon du 30 mars 2022, n°20LY02224).
La juridiction administrative démontre ici une nouvelle fois que les consommations au sein d’une habitation (Electricité, eau…) constituent une preuve quasi indiscutable pour caractériser ou non la résidence principale du cédant.
La plus-value réalisée par une personne physique lors de la cession à titre onéreux d’un bien immobilier qui constitue sa résidence principale au jour de la cession n’est pas imposable.
Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l’impôt, d’apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l’assujettissement à l’impôt ou, le cas échéant, s’il remplit les conditions légales d’une exonération.
Dans cette affaire jugée par la Cour d’appel de Lyon, il convient de rappeler les faits :
Par acte du 30 mars 2011, M. B a acquis, pour un montant de 21 000 €, un terrain à bâtir à La Chapelle-sur-Oreuse (Yonne), sur lequel l’édification d’un immeuble à usage d’habitation a été achevée en mars 2012. Par acte du 30 juillet 2013, M. B a cédé ce bien immobilier moyennant un prix de 172 000 euros.
La plus-value qu’il a réalisée à cette occasion a été placée sous le régime de l’exonération prévu l’article 150 U-II-1° du CGI (exonération au titre de la résidence principale).
A la suite d’un contrôle, l’administration a remis en cause cette exonération au motif que cette habitation ne pouvait être regardée comme la résidence principale de l’intéressé au jour de la cession.
M B a fait appel du jugement du 24 juin 2020 du TA de Dijon en tant qu’il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge de l’imposition. La CAA de Lyon vient de rejeter l’appel de M. B
L’administration fiscale, pour rejeter l’exonération, s’est appuyées sur les relevés de consommation d’électricité pour la période du 8 juin 2012 au 19 août 2013 et les relevés de consommation d’eau pour la période de décembre 2011 à mai 2013.
Il a été relevé :
- une consommation moyenne d’électricité, sur la période du 8 juin 2012 au 19 août 2013, postérieure à l’achèvement de la maison d’habitation, de 4 946 kWh, inférieure de moitié à la consommation prévisionnelle définie d’un commun accord avec le fournisseur d’électricité.
- une consommation de 5 m3 d’eau sur la période de décembre 2011 à mai 2013 comprenant la période de construction de l’habitation.
Pour justifier que l’immeuble cédé constituait sa résidence principale au jour de sa cession, M. B se borne à soutenir que sa consommation d’électricité annuelle est cohérente avec une étude statistique qu’il produit à l’instance, mentionnant une consommation moyenne des foyers français en 2016 de 4 679 kWh par an.
Pour la Cour, l’étude statistique produite ne tient pas compte ni de la composition du foyer ni de la surface de l’habitation. La Cour confirme que l’exonération résidence principale ne pouvait s’appliquer.
On le constate les détails comptent pour l’application de cette exonération, laquelle est de plus en plus contestée par l’administration fiscale, preuve pour cela les jurisprudences de plus en plus nombreuses sur ce sujet.
En conclusion, il convient d’être très vigilant sur le respect des conditions d’applications de cette exonération sous peine de devoir en payer parfois très cher les conséquences en cas de remise en cause par l’administration fiscale.